Du peintre Marc Chagall au président d’Israël Shimon Peres, plusieurs personnalités nées sur les terres qui constituent le Bélarus actuel ont eu une destinée hors du commun.
Mais pour Iakov Bassine, le désespoir est de mise à la vue des dommages infligés à un monument érigé en 1993 à la mémoire des juifs allemands déportés dans la capitale biélorusse pour y être exterminés pendant la Deuxième guerre mondiale.
Ce ne sont pas tant les croix gammées tracées sur le mémorial qui le désolent que les dommages cumulés dans ce centre de la culture juive que fut Minsk : de la fermeture de synagogues sous l’Union soviétique à l’Holocauste et aux problèmes auxquels continuent de se heurter les juifs sous le régime du président Alexandre Loukachenko.
"Pourquoi le procureur n’entame-t-il pas des poursuites à propos des publications antisémites ou des actes de vandalisme ?", s’interroge ainsi Iakov Bassine.
"Notre encyclopédie passe quasiment sous silence l’Holocauste et il n’y a pratiquement pas un mot à ce sujet dans nos manuels scolaires", ajoute ce codirigeant d’une union d’organisations juives au Bélarus.
Au pouvoir depuis 14 ans, le chef de l’Etat bélarusse, dénoncé par les occidentaux pour le peu de cas qu’il fait des libertés publiques, entretient dans ce domaine la polémique.
Tout en retenant une image positive de l’histoire soviétique et en participant aux défilés commémorant la défaite de l’Allemagne nazie, il a aussi encensé Adolf Hitler, s’est fait un ami du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qui prône la destruction de l’Etat hébreu, et s’est récemment attiré les foudres d’Israël pour des commentaires antisémites.
"Si quelqu’un dit que l’antisémitisme prospère au Bélarus ou que nous opprimons la population musulmane ici, ne le croyez pas !", a pourtant lancé M. Loukachenko en octobre.
Ses détracteurs déplorent que le Bélarus ait été jusqu’à oublier le poids de la communauté juive avant guerre dans les grandes villes du pays, où elle représentait de 40 à 70% de la population.
Iakov Bassine maintient que la répression des juifs et des autres minorités se poursuit comme du temps de l’URSS.
L’ambyvalence officielle est palpable concernant un petit musée juif récemment installé dans l’ancien ghetto, près d’un cimetière de la communauté transformé en parc en 1970.
Car les autorités municipales voudraient bien reprendre le bâtiment, loué à l’Etat grâce à un soutien financier allemand, pour y ériger des logements résidentiels, explique le directeur du musée, Kouzma Kozak.
"C’est une maison originale (...) C’était dans le ghetto. Il n’y a rien de tel à Minsk", affirme-t-il, déplorant le manque d’aide de l’Etat.
Dans un centre culturel juif, Mikhail Akkerman, 79 ans, poursuit sans relâche son propre combat, celui pour la survie du yiddish, qu’il parlait dans son enfance et qui, affirme-t-il, était aussi compris par ses voisins non-juifs autrefois.
"Tous les pays de la région perdent quelque chose en n’appréciant pas (à sa juste valeur) le fait que la culture juive locale est une part unique de leur histoire", s’insurge Dovid Katz, un responsable de la communauté juive dans la Lituanie voisine, à Vilnius.