car il est écrit :
Et voici un autre méfait de votre part : vous êtes cause que l’autel est couvert de larmes, de pleurs et de soupirs, si bien que l’Éternel ne peut plus se complaire à vos offrandes ni accepter de présent de votre main. Et vous dites : Mais pourquoi cela ? Parce que Dieu est témoin entre toi et la femme de ta jeunesse, que tu as trahie, elle qui est ta compagne, la femme unie à toi par un pacte (Malachie 2:13-14).
Au moment où la fiancée et le fiancé se tiennent sous la Houppa (le dais nuptial), ils expriment le vœu que les liens du mariage les uniront jusqu’à la fin de leurs jours. De nos jours cependant, il nous faut bien déplorer un taux de divorces très élevé.
La Tora certes admet la légitimité du divorce (cf. Deutéronome 24:1-4). Aussi depuis la plus antique tradition juive, ne l’a-t-il jamais considéré comme un péché. Au contraire, il est des situations dans lesquelles la décision de divorcer est appropriée voire indiquée sur le plan moral.
C’est le cas par exemple quand l’un des époux inflige à l’autre de mauvais traitements ou le dévalorise, de telle sorte que l’union conjugale ne reflète plus en rien l’image divine, comme il se doit. Ceci étant, le Talmud nous enseigne que « l’autel du Temple lui-même verse des larmes » chaque fois qu’un mariage est rompu , suggérant que le divorce est une source de tristesse immense pour ceux qui le vivent, pour le couple et la famille, mais aussi pour la communauté et la société. Le divorce peut être tantôt une solution adéquate, tantôt une tragédie, et parfois les deux. Dans tous les cas, c’est un échec qui a valeur de leçon sur la complexité des relations entre les êtres.
L’accroissement du nombre de divorces à notre époque découle de facteurs très divers, qui sont à la fois culturels, économiques et moraux. L’un de ces facteurs est l’émancipation de la femme et l’indépendance affective et économique qui en découle. La femme se trouve désormais aussi libre que son mari de rompre un mariage qu’elle jugerait malheureux. Mais le développement du nombre de divorces peut également être la conséquence d’une désillusion liée à des aspirations irréalistes entretenues par notre époque : le fait que l’un ou les deux époux, en se mariant, se figuraient s’engager dans une vie où la passion, l’exaltation et l’euphorie amoureuses resteraient toujours aussi vives. Cette sur-idéalisation de la vie amoureuse provient de l’image chimérique qu’en donnent les médias. Pour le judaïsme, la vie maritale peut être romantique et même passionnelle, mais chacun doit savoir qu’il se marie pour une expérience d’amour plutôt que pour une expérience amoureuse exacerbée ; autrement dit, pour avoir un compagnon à ses côtés et pour avoir des enfants à élever. La passion n’a sa place qu’en tant qu’adjuvant de ce que sont les principaux buts du mariage et elle ne doit en aucun cas se substituer à eux.
Même lorsqu’il s’impose, le divorce n’en reste pas moins un épisode extrêmement affligeant, un échec qui sape les espérances et les rêves de chacun des époux et brise la continuité de l’existence, déstabilisant souvent l’image que l’on a de soi-même et la confiance en soi.
Il entraîne généralement un bouleversement radical dans la vie intérieure et extérieure. Il faut prendre de nouvelles dispositions pour continuer à vivre alors qu’on ne peut plus compter sur l’autre pour être soutenu moralement, pour partager, ni même pour accomplir les tâches les plus élémentaires de la vie quotidienne. Les amis d’un couple qui divorce ne peuvent plus demeurer les « amis du couple ». Ils sont parfois par la force des choses amenés à faire des choix. Et s’ils restent amis, à titre individuel, cela génère souvent un certain malaise, parfois des maladresses. Si le couple a des enfants, le divorce aura un impact profond sur la personnalité de ces derniers et sur la façon dont ils percevront la solidité des relations d’amour, ébranlant considérablement le capital de confiance. Mais il ne faut pas perdre de vue que le trouble affectif risque d’être égal sinon pire chez des enfants qui grandiraient dans un foyer où les parents ne s’entendent pas.
À l’évidence, le judaïsme ne peut que désavouer la manière frivole ou complaisante avec laquelle le divorce est présenté dans les média et les fictions cinématographiques ou télévisées. On ne doit pas sacrifier les liens qui nous unissent à notre conjoint dans le seul but de rafraîchir son existence, en « changeant de vie ». Une telle désinvolture porte atteinte à la dignité humaine de chacun des époux et à la sacralité des liens du mariage.
En outre, tandis que la psychologie moderne met l’accent sur la primauté de l’épanouissement personnel, ce qui est souvent une manière subreptice de prôner un individualisme égoïste, le judaïsme souligne la vertu de loyauté et de persévérance propres à la sainteté, et ses effets positifs de stabilité pour l’équilibre psychique. Ainsi ne doit-on opter pour le divorce qu’en dernier ressort, après avoir tout tenté pour parvenir à la réconciliation.
Si toutefois, un couple est amené à divorcer, il doit impérativement obtenir auprès d’un tribunal rabbinique un acte de divorce juif (le guet) en bon et due forme, en sus des documents exigés par la législation du pays. Malgré le ressentiment et la colère que l’on peut éprouver durant cette période, refuser indûment d’accorder ou d’accepter ce guet ne constitue pas une façon honorable d’exprimer ses rancœurs. La loi juive a la sagesse de réclamer du couple qu’il déclare officiellement la fin de leur union au moyen du guet, ce qui représente une façon de mettre psychologiquement et religieusement un terme au mariage. Aussi, l’absence de guet interdit à chacune des parties de se remarier religieusement. En effet, l’acte de divorce fourni par les autorités civiles ne suffit pas. Il est odieux de refuser d’accorder le divorce religieux et user ainsi d’un moyen de pression ou de vengeance, en empêchant son ex-époux ou son ex-épouse de se remarier. L’honnêteté la plus élémentaire exige que les ex-conjoints se libèrent mutuellement de leur engagement religieux, afin de permettre à chacun de refaire sa vie comme il l’entend.
Ce texte est tiré de l’ouvrage : E. Dorff , Éthique de l’amour, Paris, éd. Nadir, 2000.
Messages
Il arrive que l’homme ne veuille pas délivrer le guet et on ne peut le forcer sous peine de guet me’oussa.
Dans mon cas il ne veut pas car mes deux enfants, mineurs, veulent aller vivre avec lui et moi je veux garder mes fils.
Question:que dit la Halakha ?Ai-je tort ?Je n’en peux plus
La question du divorce dans le judaïsme est extrêmement difficile.
Le mouvement Massorti fait tout son possible pour trouver une solution équitable pour les femmes trop souvent victimes. C’est un sujet extrêmement délicat et technique. La meilleure solution semble de signer avant le mariage un accord pré marital. C’est ce que nous faisons systématiquement dans un mariage Massorti .
Si le mariage a déjà eu lieu, il est trop tard pour changer quoi que ce soit. En particulier quand le mariage a eu lieu devant un rabbin orthodoxe qui refuse par principe tout changement dans le texte de la ketuba , nous ne pouvons plus rien faire.
La seule solution véritable serait que les rabbins s’intéressent enfin à ce problème et décident que dorénavant on applique une solution à tous les mariages. Hélas, seuls les rabbins Massorti le font pour le moment.
Ce n’est pas vrai qu’on ne peut pas forcer le mari à donner le divorce. De tout temps les rabbins l’ont fait et ils le font encore aujourd’hui en Israël (on a même mis des gens en prison à cause de cela). En fait, on joue sur les mots : on force le mari à « vouloir » donner le divorce…
En ce qui concerne votre problème personnel nous ne pouvons que vous souhaiter bonne chance et beaucoup de patience. Le seul moyen de le résoudre et que des rabbins fassent sérieusement pression sur votre mari s’ils en ont les moyens, ce qui est rarement le cas.
Hélas, la conduite de beaucoup d’hommes juifs dans ce genre de cas, est une honte pour le judaïsme, ainsi que la passivité de bien des autorités rabbiniques…
C’est pourquoi il faut tout faire pour appliquer une solution préventive.
Yeshaya Dalsace webmaster
Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par "solution préventive" et par "accord pré marital" sur cette question ?
David
Il s’agit d’un accord signé par les deux conjoints et leurs témoins avant la cérémonie du mariage. Cet accord introduit une clause conditionnelle dans le mariage « tenay bekidushin ». Cette clause stipule que les mariés se donnent six mois après le divorce civil pour régler le problème du divorce religieux. Dans le cas où la clause ne serait pas respectée les rabbins ont la possibilité de considérer le mariage nul et non avenu.
Cette solution n’est pas forcément la meilleure et présente quelques points faibles sur le plan de la Halakha tout en étant conforme à celle-ci, mais elle est assurément la moins mauvaise et permet d’éviter bien des situations douloureuses.
Bonjour, quand sait on que l’on a tout essayé ?
vous parlez d’épanouissement personnel qui peut devenir égoïste, mais est ce égoïste qu’ en tant que femme , après avoir élevé cinq enfants, on ait besoin de s’épanouir aussi surtout quand la vie a deux est inexistante ?
Bonjour,
Je suis divorcée d’un mariage mixte avec une enfant adoptée en France à la naissance. Je souhaite inscrire ma fille à des cours de Torah mais on me le refuse sans l’accord de son père par écrit. Et si le juge m’a octroyé les fêtes religieuses avec ma fille, il n’a pas voulu me donner dans le jugement l’exclusivité sur l’éducation religieuse. Evidemment, mon ex mari qui suivait la religion juive avec moi et notre enfant le conteste aujourd’hui.
Qui va m’aider à enseigner à ma fille les préceptes de notre communauté que je ne connais que par tradition et l’imprégner de cette foi en étant seule et isolée avec elle ?
Merci pour votre aide.