Les fêtes de Tichri sont sous le signe de la Teshouva : reste à comprendre ce que cela veut dire. On traduit souvent ce terme par « retour », retour sur soi, retour à la tradition, retour vers de meilleures résolutions. Littéralement, Teshouva signifie une réponse. Réponse à qui ? De qui ? Ce qui est clair, c’est que nous avons chacun notre part dans la réponse attendue. C’est pourquoi chacun doit essayer de répondre à lui même et non attendre une réponse toute faite et donc forcément artificielle d’une personne extérieure. La réponse (ou plutôt l’amorce de réponse) est forcément en nous, le problème est de lui donner voix.
On voit parfois dans la Teshouva un retour, parfois forcené, à la stricte pratique des Mitsvot. Le Baal Teshouva est souvent un pratiquant caricatural qui perd tout naturel quand il ne devient pas franchement infréquentable. A-t-il donc trouvé la bonne réponse et les autres refuseraient-ils de voir la réalité en face ? Personnellement, je ne le pense pas. La pratique des mitsvot, qui est très importante, est le moyen d’une réponse, elle trace la voie, mais ne saurait suffire, pour elle-même, à donner un sens.
La première étape, incontournable, mais qui fait peur à bien des gens, me semble être celle de la question. Cette question, chacun a la sienne qui lui est propre, elle-même comportant de multiples facettes, changeant au gré du temps. C’est une quête, quête de sens, quête de soi, toujours respectable car forcément sincère. C’est pourquoi Rosh Hashana est l’anniversaire du monde, l’anniversaire de l’être, la genèse de toute question. Il est si difficile de poser véritablement la question, que la démarche est en soi déjà une réponse.
Cela ne peut se faire que part un retour sur soi, en soi. Retour par le silence, retour par les mots, la parole, la réflexion, la brisure en soi, l’émerveillement de l’ineffable. C’est la voie de la prière, celle du Shofar, celle de la joie et du jeûne. C’est aux confins de soi qu’on a quelque chance de trouver du sens.
La Teshouva serait donc d’abord de découvrir qu’il y a du sens en soi...
Se rendre compte de cela ne peut amener qu’à vouloir agir pour le bien, être bon, aimer, car il y a du sens à l’amour, et l’amour donne du sens à l’être (il est, pour nos sages , la première et l’ultime mitsva). Cela ne peut se passer que dans la souplesse, jamais dans la crispation ; que dans l’ouverture à l’autre, jamais dans le jugement ; que dans la largeur de la Neshama, jamais dans la mesquine étroitesse d’esprit ; que dans l’absolue liberté de penser, jamais dans le dogmatisme ; que dans la constructive remise en cause, jamais dans le martèlement de vérités toutes faites ; que dans un optimisme de fond, jamais dans une triste indifférence ; que dans la générosité, l’amour, le bonheur d’être...
Peut-être qu’en ces jours redoutables il ne faudrait chercher que cela, et c’est pourquoi ils sont si redoutables...
Bien entendu ce chemin, presque impossible, demande de l’aide ; nos maîtres ont exploré pour nous des voies, l’étude en est le cheminement ; la pratique des Mitsvot en est l’instrument nécessaire ; la communauté est là pour nous offrir un cadre... C’est la lumière de la tradition juive, la force de l’engagement juif, de l’être juif, tellement heureux de pouvoir revenir. Chemin interminable à recommencer chaque année.
Celui qui y arrive vraiment mérite assurément d’être appelé « maître de la réponse », « Baal Teshouva ».
Avec tous nos vœux de bonheur, de santé, de prospérité et de Shalom, pour nous tous et tout Israël.
שנה טובה וגמר חתימה טובה
Yeshaya Dalsace
Halakha sur la Teshouva
Au sens propre, on est censé demander pardon aux autres des fautes commises envers eux. Voici comment la Halakha voit les choses :
Il est enseigné dans la Mishna Yoma : « Le jour de Kippour n’expie que les fautes de l’homme envers son créateur ; celles de l’homme envers son prochain nécessitent une réconciliation » comme le verset stipule : « car ce jour (kippour) expie et purifie vos fautes devant Dieu » : ce qui vient exclure devant votre prochain.
Il est donc nécessaire de demander pardon aux gens à qui nous avons fait du mal avant Kippour. La démarche exige humilité et courage, bien des gens refusant un tel compromis.
Dans le Talmud (Baba Kama 92) il est précisé à propos d’un homme qui cause un dommage corporel à son prochain que malgré le remboursement du dommage, des excuses explicitement prononcés sont incontournables. En effet le dommage n’est jamais que corporel et un préjudice moral existe toujours.
Quand un homme demande pardon à son prochain celui-ci ne doit pas s’entêter dans une position de refus, mais au contraire accepter la réconciliation. cela également exige humilité et manque d’orgueil.
Règles de Teshouva d’après Maimonide
Si la personne lésée refuse le pardon, le fauteur se présentera devant elle, accompagnée de trois personnes pour renouveler sa demande de pardon ; si elle accuse un nouveau refus, elle se présentera une 2e ou 3e fois avec à chaque fois trois nouvelles personnes ; si en fin de compte, la « victime » refuse le pardon ; c’est elle qui sera considérée comme fautive.
Un homme n’a donc pas le droit de refuser le pardon sincère à son prochain.
Lorsque l’on pardonne à notre prochain, cette démarche doit être sincère et sans rancune.
Si la personne offensée n’est plus de ce monde le fauteur se fera accompagner d’un Minyane pour se rendre sur la tombe du défunt ou à défaut le fera à la synagogue en présence de ce Minyane et dira ainsi : « J’ai fauté envers le Dieu d’Israël et envers untel, etc... ». En précisant la faute commise.
Conclusion
L’essentiel reste la sincérité et l’écrasement de son orgueil. La capacité à ne pas recommencer.
Messages
Merci de votre enseignement.
J’en suis à étudier une version du Midrash (Le Midrash raconte), suite à une lecture assidue depuis plusieurs années de la Tanak et du Nouveau Testament. De rechercher la définition du terme "Teshouva " m’a conduit à votre blog.
Au sein des Alcooliques anonymes nous avons dans le programme des 12 étapes une Teshouva de recommandée (étapes 4 et 5) qui doivent mener à une Halaka (étapes 8 et 9).
Quelle joie que de voir confirmée cette démarche par la sagesse millénaire du judaïsme !
Merci